Combien coûte l’absentéisme aux entreprises françaises ?

février 1, 2024

Quel est le véritable coût de l’absentéisme pour l’entreprise ? La question a le mérite d’être posée, dans un contexte où, selon une étude signée l’Institut Sapiens, l’absentéisme aurait un coût annuel de plus de 100 milliards d’euros ! Au-delà du coût, quels sont les facteurs déclenchants ? Quel est l’impact de l’absentéisme sur l’entreprise ? Et surtout, comment le réduire ? Eléments de réponse !

L’absentéisme, un coût sous-estimé qui pèse lourd sur l’économie française

Les directions des ressources humaines (sur lesquelles on compte pour avoir des entreprises performantes) ont une bataille à mener contre un ennemi « invisible » : l’absentéisme ! En ligne de mire : l’amélioration de la performance globale de l’entreprise, rien que ça… Sous-estimé, le coût réel de l’absentéisme se révèle assez conséquent, la preuve en chiffres.

En 2015, une étude du cabinet Ayming, en partenariat avec AG2R La Mondiale, basée sur un échantillon représentatif de 26 230 entreprises françaises et englobant plus de 960 000 travailleurs, révèle une absence moyenne de 16 jours par employé par an. Cette enquête chiffre le coût total de l’absentéisme au travail à 60 milliards d’euros ! Dans le détail, ce montant se décompose en 45 milliards d’euros de coûts directs (maintien de salaire, dépenses de remplacement temporaire…) et 15 milliards d’euros de coûts indirects (prévention, prévoyance, cotisations d’accidents du travail…).

Deux ans plus tard, en 2017, une nouvelle enquête du même cabinet montre une tendance alarmante : le taux d’absentéisme s’envole à 4,72 %, avec une durée moyenne d’absence qui atteint 17,2 jours par an et par salarié. Dans une étude plus récente sur l’origine et le coût de l’absentéisme en France, l’Institut Sapiens évoque un coût encore plus astronomique : 108 milliards d’euros par an ! Pour arriver à cette estimation, l’institut a pris en compte les salaires versés aux salariés absents, mais aussi le temps consacré par les salariés présents à compenser les dysfonctionnements induits, ainsi que l’achat de services externes imprévus. Le coût moyen est ainsi porté à un peu plus de 4 000 euros par an et par salarié. Pour mettre ces chiffres en perspective, cela représente l’équivalent du budget de l’Education nationale, ou 4,7 % du Produit Intérieur Brut français…

Autre fait à noter : le taux d’absentéisme s’établit à 4,72 % dans le secteur privé (21,3 millions de salariés), contre 8,34 % dans le secteur public (5,3 millions de salariés). La moyenne annuelle s’élève à 10 jours d’absence dans le privé et à 18 jours dans le public, avec un coût moyen sensiblement plus élevé dans la fonction publique territoriale (6 223 euros contre 3 521 euros), pour une moyenne globale de 4 059 euros par employé et par an. Multiplié par le nombre total de salariés, le coût global atteint 107,9 millions d’euros, soit 16 % de l’ensemble des salaires versés en France en 2017, l’équivalent du budget des ministères de l’Education nationale, de la Recherche et de l’Enseignement supérieur, et 1,4 fois le montant de l’impôt sur le revenu.

L’absentéisme varie selon les secteurs

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’absentéisme en France n’est pas un phénomène uniforme, en cela qu’il se manifeste avec des intensités et des caractéristiques différentes selon les secteurs d’activité. A ce propos, une étude signée Ayming révèle que le secteur des services est particulièrement exposé, avec un taux d’absentéisme de 5,65 % en 2015, dépassant nettement celui du BTP, qui enregistre un taux de 3,90 %.

Autre aspect significatif de l’absentéisme : l’âge des employés. En effet, la tendance indique une augmentation du nombre de jours d’absence avec l’âge. En moyenne, les moins de 30 ans s’absentent 11 jours par an, tandis que les employés de plus de 55 ans franchissent le seuil de 3 semaines d’absence annuelle. A cela s’ajoute la question de l’égalité entre hommes et femmes, qui s’inscrit également dans cette thématique. A ce propos, les chiffres révèlent un écart assez large, avec une moyenne de 13,6 jours d’absence annuelle pour les hommes, contre 18 jours pour les femmes.

En ce qui concerne la taille des structures, l’étude d’Ayming révèle que celle-ci joue un rôle dans la fréquence et la durée des absences. Dans les collectivités territoriales, par exemple, les agents des grandes structures s’absentent plus fréquemment et plus longtemps que ceux des petites collectivités. Le taux d’absentéisme y oscille entre 7,5 % et 10,4 % selon l’effectif, ce qui montre que les fonctionnaires territoriaux des grandes collectivités sont deux fois plus enclins à s’arrêter que dans les petites.

Des répercussions profondes sur le bien-être et le climat de travail

Nous vous le disions, au-delà de son impact direct sur la productivité des entreprises, l’absentéisme se répercute sur divers aspects du monde professionnel, notamment en termes de coûts indirects et de bien-être des employés. L’augmentation de la charge de travail, les réajustements en termes de gestion et d’organisation, ainsi que les heures supplémentaires induites, peuvent entraîner une baisse de motivation et affecter un service tout entier.

Les répercussions ne s’arrêtent pas là : une baisse de la productivité et une dégradation de la qualité du travail peuvent également se manifester, altérant ainsi la dynamique et l’image de l’entreprise. Et lorsque le service des ressources humaines est surchargé à cause de ces absences, c’est tout l’équilibre et l’atmosphère de l’entreprise qui s’en trouvent impactés !

Quelles sont donc les causes de cet absentéisme ? Elles dont diverses, au premier rang desquelles le burn-out et les troubles musclo-squelettiques, induisant des arrêts de travail prolongés, souvent à cause d’un accident induit par un défaut de prévention du risque. Si les congés de maternité, les maladies et les accidents du travail représentent une partie des absences, il faut savoir qu’elles ne constituent qu’un tiers de l’absentéisme au travail. A ce niveau, l’Institut Sapiens met en lumière les absences dites « de convenance », liées à des motifs personnels. Dans 99 % des cas, ces absences sont attribuées à des causes physiques, notamment les troubles musculo-squelettiques ou psychologiques.

Les conditions de travail dégradées sont souvent incriminées, et selon l’étude, elles seraient corrélées à des lacunes en matière de management. Un management qui, figé dans des méthodes désuètes, peine à s’adapter aux réalités actuelles de l’organisation du travail et des relations humaines et professionnelles. Cette situation se traduit par un sentiment de déconsidération ou de perte de sens chez de nombreux salariés, exacerbant le sentiment de mal-être au travail.

Bibliographie :
https://www.institutsapiens.fr/wp-content/uploads/2018/11/Cout-absenteisme.pdf

15ème Baromètre de l’Absentéisme et de l’Engagement


https://www.cairn.info/load_pdf.php?ID_ARTICLE=MAV_135_0009&download=1