Quels contours pour le futur « produit d’épargne européen » voulu par Macron et Scholz ?

juin 4, 2024

En annonçant leur intention de lancer un « produit d’épargne européen », Emmanuel Macron et Olaf Scholz ont jeté un pavé dans la mare mardi dernier. Mais, entre nous, tout cela reste encore entouré de mystère… Comment va-t-on concrètement s’y prendre ? Il semblerait que ce nouveau produit pourrait s’inspirer de mécanismes d’épargne déjà en place. Reste donc à voir comment ce projet va se matérialiser…

Macron et Scholz s’allient pour un « produit d’épargne européen »

L’idée était dans l’air, elle prend maintenant forme avec un soutien de taille. Mardi soir, au château de Meseberg, près de Berlin, Emmanuel Macron et Olaf Scholz ont uni leurs voix pour annoncer leur projet commun : la création d’un « produit d’épargne européen ». L’objectif ? Rien de moins que de canaliser les capitaux privés pour doper la croissance sur le continent. Selon le président français, il est temps de stopper l’hémorragie des milliards d’euros qui délaissent l’Europe pour les placements américains, faute d’options attractives sur notre sol.

Déjà en février, Bruno Le Maire avait remis cette idée sur le tapis, cherchant à lui donner un nouveau souffle. Après plusieurs discussions avec ses homologues allemands, Christian Lindner (Finances) et Robert Habeck (Économie), ainsi qu’entre les deux leaders de la France et de l’Allemagne, Berlin a finalement exprimé son plein soutien au projet, comme l’indique le cabinet de Bruno Le Maire.

Vers un produit d’épargne européen

Nous vous le disions, la forme que prendra le futur produit d’épargne européen annoncé par Emmanuel Macron et Bruno Le Maire reste encore floue. Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’épargne, souligne : « Pour le moment, Emmanuel Macron comme Bruno Le Maire sont restés extrêmement vagues. Entre l’intention qui a été mentionnée et la réalisation, il y a du travail ». En effet, l’harmonisation d’un produit unique à travers l’Europe se confronte à des pratiques, des législations et des intérêts divergents parmi les Vingt-Sept.

Pour sa part, Bercy, et Stellium Invest considère que c’est une piste à creuser, a évoqué une approche alternative qui éviterait de créer de toute pièce un nouveau produit. Cette stratégie suggère de rallier les produits nationaux autour d’un cahier des charges commun, incluant des critères comme un minimum d’investissement au sein de l’Union européenne ou une période d’investissement prolongée. En France, le Plan d’Épargne Retraite (PER) ou le Plan d’Epargne en Actions (PEA) pourraient être impliqués dans ce cadre.

Initialement, ce dispositif pourrait ne pas s’étendre à tous les pays membres, mais se limiter à un groupe restreint d’Etats. Ces derniers s’engageraient à offrir les meilleures conditions fiscales possibles. Guillaume David, membre du directoire d’Arkéa IS, estime que « l’idée de se concentrer sur les produits les mieux-disants dans chaque pays constitue une grande avancée des dirigeants ». Selon lui, favoriser un label sur des instruments d’épargne existants serait une solution plus efficace et rapide que la création d’un nouveau produit.

Un tournant risqué mais nécessaire pour l’épargne européenne

Bonne nouvelle : l’ambition de rediriger une plus grande part des 35 000 milliards d’euros d’épargne financière des ménages européens vers les marchés d’actions pourrait se concrétiser dès 2025. L’initiative, bien que comportant des risques du fait de son investissement en actions, vise à calquer le modèle américain pour dynamiser le financement des entreprises européennes.

« Entre les enjeux liés à la transition énergétique, numérique, la défense et les retraites, il est crucial de réorienter l’épargne du Vieux Continent vers des actions européennes, il en va aussi de la souveraineté de nos entreprises, dont les premiers actionnaires sont souvent des fonds américains », souligne Guillaume David. Cette stratégie pourrait également contribuer à améliorer les valorisations des actions européennes, qui sont traditionnellement inférieures à celles des Etats-Unis.

Bien que l’industrie financière reste prudente quant à la réalisation concrète de ce projet, l’impulsion politique reçoit un accueil très positif. « Tout ce qui permettra de renforcer le financement de l’économie européenne, qui fait face à de nombreux enjeux, est un signal positif », déclare la Fédération bancaire française. Philippe Crevel ajoute : « En Europe, on manque de profondeur de marché, on a besoin de financements longs pour les entreprises ».